Eisenstein: l’œil extatique

L’œil extatique: Sergei Eisenstein, cinéaste à la croisée des arts

- Serguei Eisenstein nait en 1898 (3 ans après l’invention du cinématographe) dans une famille aisée, cultivée, et cosmopolite. Il parle allemand, français et russe, commencera par faire des études d’ingénieur comme son père avant de s’engager dans l’armée rouge en 1918. Il est affecté au théâtre et deviendra chef décorateur avant de devenir cinéaste des années plus tard.

- Chaque salle dans l’exposition montre un film d’Eisenstein et des références pour l’étayer.

- Il appartient au mouvement constructiviste. La salle est pleine d’échafaudages sur les murs pour évoquer cela ainsi que ses nombreux projets inachevés 

- 1er coup de cœur cinématographique : les 400 faces du Diable, Méliès 

- Il veut provoquer l’extase chez le spectateur  (étymologie d’extase : sortir de soi-même )

- Il est ami avec Charlie Chaplin, qu’il rencontre aux USA (machine, constructivisme)

- Meyerhold fait le pendant avec sa théorie au théâtre : le biomécanisme : entrainer répétitivement et mécaniquement le corps, pour affuter le mouvement et provoquer l’extase chez le spectateur

 

 

 

 

FILMS VUS AU MUSEE

Le journal de Gloumov, 1923

-  1er cours métrage d’Eisenstein

- Inflluences : Méliès, Cirque, Fantomas

- Exacerber les mouvements, les mimiques, pantomimes pour provoquer des émotions 

- Une journée de la vie de « Gloumov » vue en quatre minutes

La Grève, 1924

 1er long métrage d’Eisenstein. Il s’inspire de la Comedia del Arte et des gravures de Piramani sur les prisons imaginaires

- Synopsis : Soulèvement d’ouvriers mécontents après qu’un de leurs collègues se soit pendu suite à l’accusation d’avoir volé un micromètre. Ce soulèvement fut violemment réprimé 

- On remarque une grande dichotomie entre « bons » et « méchants ». Eisenstein utilise la physiognomonie pour le montrer : rattacher des caractères animaux aux traits humains pour différencier les « bons » et les « méchants »

- Jeux sur la profondeur, le mouvement… Utilisation du montage parallèle : taureau mort/ouvriers écrasés 

- Einsenstein est une « éponge plastique » : il absorbe toutes les références antérieures au cinéma, emploie des références universelles : la descente du pendu place l’ouvrier en martyr et fait référence à la descente de croix

- Le film est restauré et sonorisé en 1969 avec les extraits de la 5ème et de la 6eme symphonie de Chostakovitch

 

Le cuirassé Potemkine, 1925

- Ce long métrage est souvent considéré comme la plus grande œuvre de propagande de tous les temps

- Il est choisi en 1958 comme meilleur film de tous les temps par 117 critiques internationaux à l’exposition universelle de Bruxelles

- Il s’agit d’une œuvre de propagande commanditée par l’Etat soviétique pour commémorer les 20 ans du soulèvement du cuirassé Potemkine en 1905

- Le synopsis relate des faits réels : une mutinerie de marins après qu’ils ont été forcés par leurs supérieurs de manger de la viande avariée et qui se finit en bain de sang (pour les marins et les civils qui les ont rejoints. L’action se passe au port d’Odessa

- Le cuirassé reproduit les clivages de la société russe et ses inégalités.

- Il fut longtemps interdit dans les pays occidentaux pour cause de « propagande bolchevique » et incitation à la violence des classes

- Eisenstein met en avant le massacre des innocents pour émouvoir le spectateur par le biais de la célèbre scène de la descente des escaliers d’Odessa (qui n’a en réalité jamais existé, il n’y a pas eu de massacre sur les escaliers)

o Eisenstein crée une esthétique du choc grâce au montage de cette scène 

o Il y a une succession de plans courts, le cadrage et les points de vue sont très différents, une succession extrêmement rapide des plans qui entraine une rupture avec les codes du cinéma, notamment hollywoodien.

o Il cherche à créer l’émotion, le choc « visuel », l’affect, un rythme qui emmène le spectateur (montage des « attractions »

o Il dénonce la barbarie des soldats et l’état tsariste

o Le landau dévalant les escaliers provoque l’empathie car un bébé, l’être le plus innocent qui soit est victime des soldats, décrits comme des machines de guerre sans cœur. Cette scène est rentrée dans la culture populaire et on retrouve le motif du landau dévalant les escaliers dans de nombreux films.

o La mère qui hurle quand elle perd le landau évoque la figure de la Pieta ou de la Mater Dolorosa (éponge plastique) et de l’injustice.

- Dans certains pays le film est altéré et certaines scènes sont censurées 

- Ce film a connu différentes mises en musique

o En 1975 pour le 50 -ème anniversaire du film, il est restauré : on souhaite une musique profondément soviétique et on choisit celle de Chostakovitch (symphonies 5, 10 et 11)


La ligne générale, 1926

- Célèbre la nouvelle politique agricole du parti communiste russe

- Marfa, une paysanne non idéalisée donc réaliste, rêve de moderniser son village, donc de passer par l’industrialisation et les kolkhozes

- Elle rêve d’un taureau sacré, symbole de virilité 

- Fait référence à la crémière inspirée par Fernand Léger 


Glass house, 1926

- Projet inachevé 

- Synopsis : péripéties dans un gratte-ciel entièrement transparent car fait de verre (sol, murs et plafonds)

- Ce film fait référence à l’œil de Staline omniscient et à la surveillance exercée par les services secrets, ce qui est un thème récurrent chez Eisenstein

- Au musée une structure a été mise en place pour construire une architecture du film

 

Octobre 10 jours qui ébranlèrent le monde, 1927

- Commande passée de l’Etat pour Eisenstein, pour les 10 ans de la révolution d’Octobre 1917

- Acteurs non professionnels pour donner une apparence plus réaliste : c’est un ouvrier qui joue Lenine

- Ils rejouent la prise du palais d’hiver en s’inspirant de la révolution française (prise de la Bastille)

- Statue renversée comme symbole du pouvoir déchu 

- Séquence des Dieux : il pense que le concept de Dieu est creux et caricature les statuettes religieuses

- Education par le cinéma 

- On le qualifie d’ »artiste du grand écart » car il est versatile 

- A l’origine muet, il fut sonorisé en 1967 sur une musique de Chostakovitch


Que viva Mexico, 1931

- Film sur la fête des morts au Mexique, sorte de carnaval

- Eisenstein est gay et il veut rester au Mexique où son homosexualité est autorisée. Il ne veut plus rentrer en Russie

- Mais il doit rentrer en Russie : Staline menace sa mère et il est obligé d’avouer à tout le monde son homosexualité 

- Il ne pourra jamais finir « Que viva Mexico » car le film est confisqué 

- Le film sera monté après la mort d’Eisenstein

Alexandre Nevski, 1938

- Film de propagande commandité par Staline pour effrayer les nazis

- Evénement important de l’histoire de Russie : opposition du prince Nevski à l’invasion des chevaliers teutoniques (allemands) qui met fin à leur expansion orientale

- L’URSS affirme qu’elle est prête à se défendre contre l’envahisseur : les teutons représentent les nazis et les Russes les bolcheviques)

- Retiré en 1939 après le pacte de non-agression avec l’Allemagne, le film est ressorti en 1941 après l’opération Barbossa.

- La musique est de Prokofiev et rencontra un très grand succès. Elle fait naitre des contrastes comiques ou dramatiques avec les images

- Certaines scenes du film apparaissent dans le clip du groupe Stupeflip : « Stupeflip vite !!! »

Ivan le Terrible, 1944

- Le film prend appui sur un personnage historique : Ivan IV

- Retrace les efforts du tsar Ivan le Terrible pour unifier les terres russes en un état moderne et puissant.

- Un personnage historique : Ivan le Terrible (1533-1584) : a cause d’une révolte de nobles dans son enfance, il les tient à l’écart quand il devient Tsar. Il réforme profondément le pays et mène de nombreuses campagnes militaires. En 1564 il abdique et part à Moscou avec une partie de la cour. Sous la pression populaire il accepte de remonter sur le trône. Il gagne son surnom Ivan le Terrible car il extermine sans pitié ses opposants. Souvent excessif et cruel, il fonde une Russie forte et crée un modèle de pouvoir suprêmes pour les Tsars.

- Le film est composé de 2 parties :

1ere partie (1945) récompensée: montre le Tsar unificateur et grand chef militaire (évocation de Staline)

2eme partie (1958) censuré juqu’en 1958: montre le Tsar décadent (dernières scènes en couleurs), vu comme une critique de Staline

- Cela met fin à la carrière d’Eisenstein

- La musique est de Prokofiev

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